Nous vivons dans
une culture de l’éphémère. Tout change et évolue. Mais une chose demeure :
la fin de vie et le décès que l’on ne peut éviter. Les funérailles, quelle
qu’en soit le forme, sont aussi une occasion de manifester et célébrer la
solidarité de la famille, des amis du défunt, des membres de l’Eglise. L’Eglise
n’a plus le monopole de ces célébrations. Il ne s’agit donc pas de maintenir
coûte que coûte les coutumes d’hier mais d’initier un renouveau, un
approfondissement pour d’une part appréhender les valeurs promues par les
funérailles d’aujourd’hui et d’autre part pour mieux comprendre, selon notre
foi, cette entrée du défunt dans le monde de la Résurrection. Ce numéro de La Maison
Dieu est une porte ouverte dans ce sens.
Voici une recension du Père Gilles Mathorel sur un article paru dans 'La Maison Dieu'. Le numéro de mars vient de paraître, avec quelques mois de retard....Mais l'article évoqué et commenté par le Père est fort intéressant. Bonne lecture!
"Des Rites Funéraires
en Mutation"
"La Pâque du
Chrétien – La Crémation au risque du corps"
La Maison Dieu - n° 281 - Mars 2015
Ce numéro de la
Maison Dieu est le bienvenu alors que nous approchons du 2 novembre. Le premier
article (p.17 à 33) de Guillaume Cuchet est très académique. Il donne un point
de vue historique et anthropologique. Il en est de même avec l’article de
Monique Brulin (p. 35 à 61) qui essaye de comprendre la crémation dans les
différentes religions.
Sur le plan de la
pastorale, les trois articles suivants sont, à mon point de vue, bien plus
interpellant. Ils nous invitent d’abord
à constater et accepter que nous n’avons plus l’exclusivité des
funérailles. Il y a maintenant d’autres lieux et d’autres professionnels pour
ces célébrations, disons laïques des funérailles. Tout au début de l’Eglise,
les funérailles, comme les mariages, étaient entre les mains des laïcs ;
puis, il y eut une cléricalisation des funérailles (p.77). De nos jours, la
place du ministre ordonné devrait toujours être privilégiée si l’on considère
que toutes célébrations de funérailles sont une « expression de la
solidarité du Corps du Christ pour l’un de ses membres ». (p.81-83)
Beaucoup de nos
auteurs soulignent ensuite les ambiguïtés de la crémation. D’abord, on nous
invite à distinguer « la crémation en soi de l’intention qui préside à ce
choix » (p.115) Ensuite ses caractéristiques sont énoncées d’une manière
parfois imagée : « c’est un non-rite, une culture du provisoire, de
la fluidité, de l’éphémère et de l’absence de mémoire (p.69) » -
« C’est une violence, une rupture brutale (p.99). – Et selon Sylvie
Robert, c’est un geste « technicisé et professionnalisé qui aboutit à une
laïcisation de la mort – un acte qui tend à minimiser l’appréhension du mystère
de la mort. Comment cela pourrait-il dire autre chose qu’un ‘tout est fini’
(p.123-124) »
Néanmoins, la
crémation est là et nous interpelle. Et comme le souligne Bernard Maitte :
« Lorsqu’une question est posée, la conversion première est la
nôtre. » (p.107) Il faut donc retrouver le message que l’on peut
transmettre, sous forme symbolique, à l’occasion des funérailles comme des
crémations. Si l’un propose d’essayer une symbolique à partir des cendres,
d’autres soulignent que ce travail de symbolisation reste très difficile avec
la crémation et ainsi ne facilite pas l’accès à la richesse de la foi
chrétienne concernant l’au-delà (p.126). Il y a dans les funérailles un
cheminement en cortège de la maison, à l’Eglise, au cimetière ;
cheminement symbolisant aussi le passage de la croix, au tombeau, au Cénacle
(p.75 et 102). Au Cénacle, les apôtres sont entrés dans une nouvelle relation
avec le Christ. C’est une telle nouveauté de relations qui est à la base de la
Résurrection des morts. C’est pourquoi, la Résurrection ne devrait pas être
comprise comme une « revivification du corps » (p.120) mais plutôt
comme l’entrée dans une nouvelle dimension relationnelle et communionnelle de
la vie.
On pourrait
conclure que les funérailles ne cherchent pas à faire disparaître un corps mais
doivent être une annonce de la foi eschatologique, une mise en évidence du
mystère de la mort, l’affirmation de la valeur unique de la personne devant
Dieu, la puissance de vie de Dieu et la dimension de communion avec Dieu.
(p.130)
En bref, une
lecture enrichissante qui peut servir de base pour un partage entre équipes
pastorales.
Le Père Gilles
Mathorel